Winter's Bone
Ree Dolly a 17 ans, vit à Ozark. Elle doit s'occuper seule de son petit frère et de sa petite soeur, puisque son père est en prison et que sa mère souffre d'une maladie mentale. Le paternel est depuis peu en libération conditionnelle, mais à disparu et sans de ses nouvelles, la banque prendra la maison où vit la famille Dolly. Ree doit donc trouver son père, mais doit faire face à l'hostilité de la population locale, qui a un lourd secret à cacher.
On en fait très peu des films comme WINTER'S BONE, tout simplement, car nos habitudes cinématographiques ont évolué (pas toujours pour le mieux) et que les films peignant des portraits sociaux, forts populaires en Europe dans la première partie du vingtième siècle, n'ont plus la cote, car la description passait avant l'action. Le film de Debra Granik n'est pas exceptionnel, mais il fait du bien et sort du lot, se permet de prendre son temps et de respirer, dans une histoire qui du point de vue hollywoodien, aurait tout d'une course à la montre. Dans le film de Granik, quand les choses ne vont pas déjà mal, elles empirent. Les personnages sont tous sales, souvent antipathiques et refusent d'aider l'héroïne, symbole presque absolu de détermination à sauver au sort monstrueux qui attend sa famille. Granik ne vient pas du coup, démolir complètement une population, elle les filme avec eux et avec leurs intentions. Elle ne montre jamais une supériorité condescendante, mais montre une compréhension et une acceptation assez touchante.
Granik travaille son atmosphère avant de travailler ses personnages, ce qui est rare et ici assez efficace. Les Ozarks, c'est un lieu assez repoussant , baignant dans la pauvreté, dans un climat froid et déprimant où un vent toujours présent se mari à la tôle et aux habitations sur le point de flancher. Granik filme, avec beaucoup de calme, les lieux et implante dès le départ le rythme d'un film qui n'en a pas et ne cherche pas à en avoir. Le désespoir colle à la pellicule et un sentiment d'acceptation de ce désespoir se sent chez les personnages. Le personnage principal l'accepte sans conteste et y fait constamment face, même à l'extrême quand elle est attaquée et demande à ses assaillants si ils vont la tuer. Ree ne questionne jamais sa situation et y fait face, car elle n'a en définitive, aucun choix. Ree se classe facilement, dans les grandes figures héroïques du cinéma américain et ce, sans avoir à tirer personne avec un shotgun.
Ce que j'ai le plus apprécié pour ma part, c'est qu'on est en présence d'une quête, d'une importance capitale. Pourtant, il semblerait que la quête ne soit au final, que de petite importance si l'on considère la quasi-absurdité dans laquelle elle se termine. Granik montre que l'important de sa quête, c'est ce qu'elle en retire et que l'on créé l'espoir. WINTER'S BONE est sombre et triste à la moelle, mais c'est un sombre et triste que l'on prendrait plus souvent.
Un film très spécial, qui respire. Émotivement difficile à tenir, WINTER'S BONE est un grand drame, qui s'éloigne des codes pour le mieux et sans s'avérer exceptionnelle, se trouve au moins à être unique.